En Suisse comme dans d’autres pays, le sel de cuisine est souvent enrichi en iode et en fluor. Stefan Trachsel, responsable du département Chimie et Technique d’application/qualité des Salines Suisses, nous explique pourquoi.
Monsieur Trachsel, pourquoi pouvons-nous acheter du sel de cuisine enrichi en iode chez nous?
L’iode est un oligoélément essentiel à la production des hormones thyroïdiennes. Une importante carence en iode peut entraîner un grossissement de la thyroïde ou d’autres problèmes de santé graves tels qu’un retard de croissance et une déficience intellectuelle. Un manque d’iode est particulièrement dangereux pendant la phase de croissance des enfants. Comme ces carences en iode étaient fréquentes en Suisse autrefois, en 1920, il fut décidé d’enrichir le sel de cuisine en iode. Comme presque toutes les personnes consomment régulièrement du sel, il est aujourd’hui encore le support idéal pour l’iode.
Quel a été l’effet de cet apport en iode ?
Les études sur la santé réalisées pour l’entrée à l’école de recrues montrent clairement que les symptômes de carence précédemment énoncés ont rapidement diminué après l’introduction d’iode dans le sel. Si l’on supprimait l’iode dans le sel, l’effet inverse ne tarderait pas à se produire. Avec la tendance actuelle qui encourage une alimentation pauvre en sel, certains groupes de la population risquent à nouveau d’être exposés à une carence en iode.
Ne pouvons-nous pas absorber de l’iode avec d’autres aliments?
En Suisse, cela est compliqué parce que nos sols sont pauvres en iode et particulièrement dans les régions alpines. Le poisson et les fruits de mer contiennent beaucoup d’iode. C’est pourquoi les régions situées près de la mer renoncent parfois à enrichir leur sel en iode.
Et quel est l’intérêt d’ajouter du fluor dans le sel de cuisine?
L’idée d’enrichir le sel de cuisine en fluor remonte à 1950 environ. Cette mesure a été prise pour lutter contre les caries. Le fluor renforce l’émail des dents qui résiste ainsi mieux aux attaques des bactéries responsables des caries. Contrairement à l’iode, le fluor n’est pas un oligoélément indispensable. C’est pourquoi enrichir le sel en fluor est plus controversé que l’enrichir en iode.
Quels sont les aspects les plus critiqués?
Alors que l’intérêt de l’iode pour réduire les maladies liées à une carence est largement admis, l’utilisation de fluor pour lutter contre les caries est plus controversée. Les consommatrices et consommateurs de sel ont donc la liberté de choix: nous produisons du sel de cuisine avec et sans iode et fluor.
Comment l’iode et le fluor sont-ils ajoutés dans le sel de cuisine?
L’iode et le fluor sont ajoutés de manière artificielle. Une solution qui contient de l’iodure de potassium et du fluorure de potassium est vaporisée sur le sel transporté par convoyeur. La loi suisse sur les denrées alimentaires indique très précisément la forme et la quantité d’iode et de fluor autorisées.
Qui définit ces taux?
Ces taux sont définis par la Commission fluor et iode de l’Académie des sciences médicales et l’Office fédéral de la santé. La Commission, composée de spécialistes du domaine médical et du domaine de la sécurité alimentaire, se réunit une fois par an. Si les besoins en iode et en fluor de la population changent, il nous est demandé d’adapter notre production. La teneur en iode a été relevée de 20 à 25 milligrammes par kilogramme en 2014 pour la dernière fois.